Lourde condamnation d’un webmaster pour avoir détourné la clientèle et les revenus d’un site par des manœuvres frauduleuses

//Lourde condamnation d’un webmaster pour avoir détourné la clientèle et les revenus d’un site par des manœuvres frauduleuses

TGI Paris, 13e chambre correctionnelle 1, 15 décembre 2015, Uptoten et autres c. J. B. 

B, le co-créateur et webmaster d’un site internet exploité par la société Uptoten, a été reconnu coupable d’escroquerie, abus de confiance et entrave au fonctionnement d’un système de traitement automatisé de données pour avoir détourné la clientèle et les revenus du site, ainsi que des revenus publicitaires. Il a été condamné à un an d’emprisonnement avec sursis et un total de 556.033 euros de dommages-intérêts par le tribunal correctionnel de Paris.

En janvier 2009, suite à des tensions avec la société et l’autre associé M, B avait dénoncé le contrat d’exploitation commercial de deux personnages d’animation qu’il avait créés avec M, contrat qui le liait à la société qui exploitait le site internet sur lequel étaient développés les deux personnages, et qui faisait de la société la titulaire à titre exclusif des droits d’auteur sur ces deux personnages, sous toutes les formules et pour tout support. Suite à cette dénonciation, B estimait être en droit de séparer les personnages du site, et de percevoir les recettes commerciales liés à eux.

A cet effet, et à l’insu de la société et de M :

(1) Manœuvres frauduleuses : B créait un lien hypertexte pirate qui s’affichait automatiquement pour chaque abonné ou client du site Uptoten.com et permettait la redirection tant des internautes que des revenus vers un nouveau site, édité par une société créée par lui et destinataire des paiements encaissés sur ce nouveau site.

Cependant, en cas de résiliation du contrat, il était prévu que les matériaux artistiques et leurs droits afférents resteraient en propre à la société, qui les avait dûment acquis ; B ne pourrait que développer l’œuvre de son côté, non reprendre les matériaux artistiques à son compte.

Ainsi, le tribunal correctionnel a donc considéré que B avait usé de manœuvres frauduleuses pour détourner les recettes issues des abonnements souscrits.

(2) Abus de confiance : B créait en secret un compte Adsense au nom de sa société pour se faire reverser les recettes publicitaires provenant de Google pour une page en libre accès exploitant les 2 personnages d’animation. B ne révélait pas non plus à la société Uptoten l’existence d’un premier compte Adsense servant à collecter les recettes publicitaires du site Uptoten.com. La société et M n’ayant aucune possibilité d’accéder à ces comptes et de toucher les revenus collectés, le tribunal a considéré que les faits étaient constitutifs d’un détournement, et donc d’un abus de confiance, même si B avait restitué une partie des sommes par la suite, la remise n’étant pas spontanée.

(3) Entrave à un système automatisé de données : courant 2009, B, qui était le responsable du bureau mauricien où était développé le contenu du site Uptoten.com, licenciait l’ensemble du personnel de ce bureau, faisant de facto cesser le développement du site, et remisait le matériel de la société Uptoten. Il s’abstenait également de restituer les fichiers sources et n’en effectuait pas de sauvegarde. Le tribunal a donc considéré que B avait entravé le bon fonctionnement du site.