Nul ne peut se faire de preuve à soi-même

//Nul ne peut se faire de preuve à soi-même

L’adage selon lequel « nul ne peut se faire de preuve à soi-même » s’applique à la preuve des titres juridiques et non des faits juridiques.

L’aptitude d’un élément produit en justice par une des parties afin d’établir la véracité d’une allégation n’est pas toujours laissée à la libre appréciation du juge judiciaire.

Il existe en cette matière des règles qui déterminent la valeur qu’il convient d’attribuer aux preuves produites.

S’agissant des témoignages produits en justice, leur force probante est appréciée par les juges du fond qui doivent les écarter dès lors qu’ils doutent de l’impartialité de l’auteur.

Ainsi, la Doctrine rappelle avec constance qu’un plaideur ne peut pas faire abstraction du principe de loyauté dans la recherche de la preuve. En effet, selon la doctrine constante, « Offrir à un plaideur la possibilité de se constituer ses propres pièces pour administrer la preuve d’un fait signifie lui offrir un espace de création qui paraît dangereux. »

Dans un arrêt en date du 31 janvier 2006, la haute juridiction a rappelé que « nul ne pouvait se constituer de preuve à soi-même et le caractère insuffisant des attestations communiquées par les salariés et appréciées souverainement par les juges du fond.
(Cass. 31 janvier 2006, n°04-20683)

Sur l’appréciation de la force probante des attestations de complaisance produites en justice, notamment par un employeur, il appartient au juge de :

  • vérifier l’aptitude physique et psychologique et le lien de subordination des prétendus témoins à percevoir, mémoriser et rapporter les faits auxquels ils prétendent avoir assisté,
  • s’assurer de leur sincérité.

De droit admis, la souveraineté des juges du fond dans l’appréciation de la foi qu’il y a lieu d’accorder à un témoignage les dispense d’exposer en quoi le témoignage qu’ils écartent pour ce motif est dépourvu d’impartialité (Civ. 2e, 22 oct. 1965, Bull. civ. II, no 787).

Ainsi, si le juge n’a pas à donner les raisons qui le conduisent à juger indignes de foi des attestations fallacieuses et, par conséquent, à les écarter (Civ. 2e, 31 mai 1965, Bull. civ. II, no 471), il est clair qu’il convient d’écarter des attestations qui contiennent des témoignages qui font douter de l’impartialité de leurs auteurs (Civ. 2e, 16 mars 1956, Bull. civ. II, no 190. – 7 nov. 1956, Bull. civ. II, no 566. – Soc. 7 mars 1957, Bull. civ. IV, no 268. – 13 mars 1958, Bull. civ. IV, no 390. – Civ. 2e, 12 mai 1965, Bull. civ. II, no 419. – 10 nov. 1965, Bull. civ. II, no 862. – Civ. 1re, 21 oct. 1975, Bull. civ. I, no 281).

C’est notamment le cas lorsqu’un employeur produit, aux fins de justifier un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, à l’occasion d’une instance prud’homale, des attestations de complaisance de ses propres salariés dont on mesure parfaitement leur intérêt à attester contre un collègue salarié licencié en rapportant des faits vagues et imprécis qui ne sont établis par leurs seules assertions incantatoires et aucune autre pièce probante : courriels, lettres, rendez-vous, convocation, projet d’acte, proposition de poste, fiche de poste, décision de refus, etc.
Rappelons d’ailleurs à ce sujet qu’en tout état de cause, le code du travail prévoit expressément que s’agissant de la cause du licenciement, « si un doute subsiste, il profite au salarié » (article L. 1235-1 du code du travail). »